Pour ce premier GT facturation électronique, notre interpellation liminaire porte essentiellement sur les données et leur sécurisation, les outils pour exploiter ces données et l’impact sur les missions et les agentes et agents.
Liminaire
« Il n’y a plus de grain à moudre en matière de lutte contre la fraude fiscale ».
Ces propos tenus par Pierre Moscovici, président de la cour des comptes et ancien ministre des finances, sont venus percuter le débat sur le budget 2026 et la recherche de rentrées budgétaires.
Pour Solidaires Finances Publiques, ces propos sont aussi mensongers qu’indécents.
La question de la lutte contre la fraude fiscale est bel et bien une question de moyens (humains et juridiques) et dépend en premier lieu d’une volonté politique, dynamique et offensive sur le sujet.
Vouloir faire de la fraude sociale une priorité est une erreur au regard des estimations de ladite fraude et une véritable injustice fiscale.
Pour la DGFiP, tenir un tel discours est un total désaveu... et le timing choisi pour le faire particulièrement désastreux.
Alors que l’administration fiscale ne cesse de louer les mérites de la facturation électronique et d’en décrire les bienfaits, les rentrées budgétaires promises ne semblent pas passionnées nos politiques. En son temps, G. Attal espérait 3 Mds d’€ de rentrées fiscales. Dans la présentation du bilan du contrôle fiscal, Mme de Montchalin a souligné l’importance des rentrées budgétaires liées au contrôle fiscal et rappelé les enjeux de la facturation électronique.
Quelles sont les prévisions de la DGFiP en la matière ? Et quels seront les véritables apports de la facturation électronique en matière de lutte contre la fraude fiscale ?
Votre document évoque la sécurisation des restitutions de crédits de TVA ou l’identification de la fraude « carrousel » à la TVA mais n’explique pas par quel biais.
Par ailleurs, le document présenté a pris le parti d’occulter la question du e-reporting. En conséquence, toute vision complète de la réforme est de ce fait impossible, notamment sur les obligations de chacun et la coexistence, ou pas, des obligations déclaratives par voie de CA3 et les nouvelles obligations créées par l’arrivée de la facturation électronique. Le document présenté est rédigé au futur, aussi il est difficile de comprendre ce qui va se passer dès septembre 2026, et encore moins de savoir ce qui est pour l’heure réalisé.
En outre, le document préparatoire se garde bien de préciser le circuit de transmission des factures et des données, et surtout de nous expliciter le rôle de chacun des intervenants. Dans le dispositif, l’annuaire des entreprises semble tenir une place prépondérante. Mais quel sera le rôle de la DGFiP dans son administration ?
Si le document préparatoire ne donne aucune information qu’on ne puisse trouver sur internet, nous espérons des réponses aux questions que nous nous posons. Nos questions ne devraient pas vous surprendre, elles ont certainement déjà été fréquemment posées lors de vos opérations de communication via le réseau des référents facturation électronique. Comme toujours, sur ce sujet comme pour d’autres le dialogue social n’est pas au rendez-vous.
Pour ce premier GT facturation électronique, nos questions (la liste n’est pas exhaustive) porteront essentiellement sur :
1/ les données et leur sécurisation
Le circuit entre les différents acteurs, et notamment les données reçues par l’administration ?
Et questions sous-jacentes des coûts engendrés par la réception des données ? Suite à la réorientation de 2024, quelle est la position de la CNIL sur la sécurisation des données nominatives ?
Quelles données nous seront effectivement transmises ? Intégralité ou partiellement.
Et quid des données dites confidentielles (secret des affaires et secret médical par exemple)?
2/ sur les outils pour exploiter ces données
Combien d’outils seront déployés ? On parle d’un outil de visualisation, de Factelec...
Par qui seront-ils développés et selon quel calendrier ?
Comment vont-ils s’intégrer dans le projet Pilat ?
Enfin, de manière naturelle et normale, nous en demanderons une présentation détaillée.
3/ sur l’impact sur les missions / agents
En premier lieu, se pose la question des effectifs : avez-vous prévu des créations d’emplois dans les services concernés pour exploiter autant de possibilités qu’offre la facturation électronique ?
Si tel n’est pas le cas (ce qui paraît plus vraisemblable), nous souhaiterions connaître les modalités de financement des 236 millions (pour l’instant ) du projet et la contrepartie concédée en termes d’effectifs pour obtenir ces financements.
En matière de gestion fiscale, vous avancez de nombreux avantages à la mise en place de la facturation électronique mais concrètement comment les agents auront connaissance des dépassements de seuils, quels moyens d’alerte ? Ou encore quel est l’intérêt d’avoir un pré-remplissage partiel des déclarations de TVA ? En revanche, vous n’évoquez nullement la nouvelle charge de travail engendrée pour les agents des SIE, avec le retour de « l’expertise en SIE ».
En matière de contrôle fiscal, la liste des questions est pléthorique. Mais la première, et la plus importante, est celle de connaître les évolutions législatives qui permettront aux agents du contrôle d’utiliser pleinement et sereinement ce nouvel outil (question du début de vérification, articulation avec les art L47 A et 47 A1…) dans un cadre juridique sécurisé.
A notre sens, la question de l’industrialisation de la programmation et du contrôle fiscal se pose à nouveau avec l’arrivée de la facturation électronique. Ce point suscite nombre de débats chez les professionnels mais surtout nous inquiète sur le devenir du CFE.
Nous reviendrons bien évidemment en séance sur de nombreux aspects de la facturation électronique. Mais ces quelques questions montrent l’indigence du document présenté alors que nous sommes persuadés de l’existence de documents plus explicites et détaillés.
En conclusion, le document revient longuement sur le calendrier de la réforme mais est muet sur les différentes étapes nécessaires à la réforme, sur ce qui a été fait et sur ce qui reste à faire.
Il est clair pour nous que ce GT ne peut se suffire à lui-même.
Pour Solidaires Finances Publiques, vu l’ampleur du projet, vu nos expériences passées malheureuses (GMBI), vu le montant des rentrées budgétaires escomptées, il est évident que la facturation électronique doit être présentée de manière exhaustive en CSAR et dans les différents GT métiers concernés. Considérée comme un projet important, elle doit également faire l’objet d’une étude d’impact et être présentée en FSR pour son impact sur les agents.
Enfin, par curiosité, nous aurions une dernière question : comment sont calculés les 3 Mds d’€ de rentrées budgétaires immédiates annoncés par Gabriel Attal en son temps ?
Solidaires Finances Publiques a toujours justifié son évaluation de la fraude fiscale. Il nous semble en conséquence logique de connaître les détails de cette évaluation des rentrées fiscales engendrées par la facturation électronique.
Compte Rendu
Prochainement.